Au Sénégal, la pandémie de coronavirus a provoqué une forte baisse de revenus des femmes entrepreneurs engagées dans l’agro-industrie. En collaboration avec des partenaires et des donateurs, Energy 4 Impact travaille pour répondre à leurs besoins immédiats et met en place des stratégies de relance pour sauver leurs entreprises en difficultés.
Une récente enquête d’Energy 4 Impact menée auprès d’entreprises dirigées par des femmes a permis de suivre les revenus quotidiens d’un échantillon de 20 groupements & entreprises de femmes impliquées dans l’agriculture et la transformation d’aliments dans les zones rurales de Fatick, Thiès, Tambacounda et Kaolack. L’enquête a révélé que leurs revenus des femmes ont chuté jusqu’à 90 %. Typiquement, les entrepreneurs qui gagnaient avant la crise entre 8,50 $ et 12 $ par jour n’arrivent désormais à générer qu’un maigre revenu de 1 à 2,50 $ par jour. Il n’est donc pas surprenant que 70 % d’entre elles soient profondément préoccupées par leurs activités, citant l’absence de clients et la baisse des revenus comme leur plus grand défi.
En août 2019, Rosalie Mané Diop a entrepris de développer son entreprise alimentaire à l’aide d’un congélateur solaire. Elle prévoyait de vendre des produits frais populaires tels que du lait caillé et crème glacé aux 2 500 habitants de son village isolé de Kourty. L’entreprise de Rosalie avait atteint un niveau de croissance constant lorsque la pandémie de coronavirus s’est propagée dans les régions du Sénégal.
Le gouvernement a déclaré l’état d’urgence : les marchés et les écoles ont été fermés et les rassemblements interdits. La crainte que les aliments surgelés facilitent la contamination au coronavirus s’est répandue, si bien que Rosalie a aussitôt enregistré une chute alarmante de ses ventes. L’interdiction des rassemblements signifiait également qu’elle perdait l’une de ses plus grandes sources de revenus qui est la vente de grandes quantités de produits frais lors de mariages ou de baptêmes. De plus, les commandes des revendeurs en provenance d’autres villages éloignés, qu’elle fournissait en produits frais, ont diminué en raison des interdictions de déplacements à l’intérieur du pays.
Tout au long de cette période difficile, Rosalie a honoré son remboursement mensuel de 65 000 frs CFA (111 $) pour le congélateur solaire acquis grâce à un crédit partiel. Au début, elle a puisé dans ses économies pour maintenir son entreprise opérationnelle, mais il était évident qu’une telle réorientation de ses finances personnelles mettait en péril le bien-être de sa famille, alors Rosalie y mit terme. Malheureusement, les perspectives de son entreprise se sont encore dégradées, les ventes ayant ralenti au début de la saison des pluies. En effet, avec un ensoleillement réduit pendant la journée, il était difficile de recharger complètement les batteries du congélateur solaire et donc d’empêcher la glace de fondre pendant la nuit. Le remboursement mensuel de son crédit est alors devenu insoutenable.
De telles difficultés commerciales sont une histoire courante pendant la pandémie de Covid-19. Dominique Thiaw, Business Mentor à Energy 4 Impact Senegal, décrit l’ampleur de la crise :
« Avant la pandémie, 90% des femmes entrepreneurs que nous soutenons pour le développement de leur production et les ventes grâce à l’acquisition de réfrigérateurs solaires, de systèmes d’irrigation, d’incubateurs, etc., pouvaient confortablement rembourser le prêt qu’elles avaient contracté pour acheter l’équipement. Maintenant, celles qui parviennent à faire face aux remboursements mensuels sont peu nombreuses. »
Afin d’atténuer les pertes financières croissantes, Energy 4 Impact a négocié avec des institutions de microfinance le report des remboursements de prêts pour une période de trois mois (potentiellement renouvelable pour un trimestre supplémentaire). Les frais d’intérêt et les pénalités de retard ont également été temporairement suspendus. Grâce à ce report de paiement, Rosalie et d’autres femmes entrepreneurs peuvent souffler et permettre à leurs familles de surmonter la crise économique et sanitaire.
En outre, les Business Mentors d’Energy 4 Impact ont élaborés des stratégies pour aider à relancer les activités des femmes entrepreneurs soutenues. Basées sur une évaluation des besoins au cas par cas, ces stratégies comprennent des conseils sur l’identification des produits et services essentiels à la survie de chaque entreprise ; la priorisation des activités les plus rentables et la réduction des effectifs si nécessaire ; et des conseils pour remodeler les pratiques commerciales afin de rendre les entreprises plus résilientes et adaptables aux situations incertaines. En outre, des sensibilisations sur la pandémie COVID-19 ont été faites pour ainsi protéger les cheffes d’entreprises, les employés et les clients contre la propagation du virus.
Energy 4 Impact travaille également avec des donateurs internationaux afin de s’assurer que les fonds et les subventions de relance Covid-19 soient accessibles aux entreprises dans le besoin. Ces entreprises ont besoin d’aide pour protéger leurs investissements et faciliter le remboursement de leurs prêts en cours. Les subventions peuvent renforcer la résilience des entreprises face à la crise économique en finançant la maintenance des équipements solaires, en réduisant le crédit et en protégeant les fournisseurs d’équipements contre les défauts de paiement.
« Nous avons réussi à mobiliser auprès de la GIZ, co-financeur de notre programme d’autonomisation économique des femmes avec le réseau ENERGIA, un fonds Covid-19 d’environ 17K Euros pour soutenir l’investissement dans le renouvellement des batteries par exemple, » dit Abdoulaye Dieng, Capital Access Coordinator à Energy 4 Impact Sénégal. « Il facilitera également le paiement des prêts en cours de 30 femmes entrepreneurs pendant la pandémie. Ce soutien financier permettra à plus de 10 femmes entrepreneures de redémarrer leurs activités et de faire face aux prochains remboursements de crédits en toute sérénité. »
« La portée de notre intervention est forcément limitée en ce moment », déclare Mathieu Dalle, Directeur Afrique de l’Ouest d’Energy 4 Impact. « Toutefois, ces plans et fonds de relance sont des exemples de bonnes pratiques et de leadership quand il s’agit de protection des investissements que les entreprises et les bailleurs de fonds ont réalisé pour élargir l’accès aux énergies renouvelables aux emplois dans le secteur énergétique et pour construire des économies durables dans les zones les plus défavorisées du monde. ».
Pour les entreprises soutenues qui sont viables mais pas assez résilientes pour traverser cette période de turbulences économiques, il est évident que les subventions peuvent constituer une voie pour la survie des activités.