Sénégal : un nouveau fonds d’urgence apporte un appui aux femmes entrepreneures en difficulté

Fév 3, 2021

Au Sénégal, des centaines de femmes entrepreneures qui ont subi des pertes commerciales dévastatrices en raison de la pandémie commencent à retrouver leurs moyens de subsistance grâce à un nouveau fonds d’urgence mis en place par ENERGIA, le réseau international sur le genre et l’énergie durable. Ce fonds fournira à 69 entreprises (comprenant 594 femmes entrepreneurs) un soutien financier indispensable pour relancer leurs activités qui étaient au point mort.

Ces femmes font partie des 12 000 entrepreneurs qui bénéficient d’un soutien dans le cadre du programme Empowering Women, Engendering Energy, mis en œuvre par Energy 4 Impact au Sénégal grâce à un financement d’ENERGIA. Elles ont enregistré une baisse moyenne d’environ 75% de leur chiffre d’affaires au cours des huit derniers mois en raison de la restriction des déplacements, de la fermeture des marchés et de l’interdiction des rassemblements publics.

Avant que la pandémie ne frappe, ces femmes avaient des entreprises florissantes et saines, utilisant la technologie solaire pour accroître leur productivité, et améliorer la qualité et la valeur de leurs produits et services – comme l’irrigation solaire pour les jardins maraîchers, les presses à huile et séchoirs solaires pour la transformation des aliments, et les congélateurs solaires pour la conservation des stocks alimentaires. Malgré la récente levée des mesures d’urgence et la reprise des activités économiques, de nombreuses femmes entrepreneurs ont été confrontées à des défis considérables avant de pouvoir remettre leur entreprise sur les rails.

Peu de mécanismes d’intervention du gouvernement au niveau local ou national sont à la disposition des entrepreneurs, dont beaucoup appartiennent au secteur informel et sont basés dans des zones rurales. Le déclin de leurs entreprises a mis en péril leurs moyens de subsistance et le bien-être de leurs familles, car nombre de ces femmes sont les principaux soutiens de famille.

Grâce au fonds de solidarité d’urgence d’ENERGIA, Energy 4 Impact aide les quelques 594 femmes entrepreneurs de 69 entreprises et coopératives les plus durement touchées à rebondir.

Le fonds, d’un montant total de 43 500 euros, sera utilisé pour aider les femmes entrepreneurs en difficulté à :

  • Rembourser les arriérés de prêts qu’elles ont accumulés au cours des six premiers mois de la pandémie ;
  • Remplacer les pièces défectueuses de leur équipement solaire, telles que les pompes, les batteries, les convertisseurs et les panneaux photovoltaïques ;
  • Libérer un fonds de roulement pour acheter les matières premières et les intrants indispensables à la reprise de leurs activités commerciales.

Les femmes sont affectées de manière disproportionnée par les arrêts de travail, car elles sont plus susceptibles de gérer de petites entreprises informelles en tant que travailleuses indépendantes. Le secteur informel et les ménages à faible revenu et dirigés par des femmes, ainsi que les femmes vivant dans des zones rurales et isolées, font partie des groupes les plus vulnérables touchés par l’éloignement social et le chômage. Ce fonds est une bouée de sauvetage pour elles, déclare Jean-Cesar Ndione, Business Développent Coordinator à Energy 4 Impact.

Outre une forte baisse de la clientèle, les entreprises ont également connu une interruption d’approvisionnement en matières premières et des hausses de prix considérables. Celles qui parviennent encore à faire des profits utilisent cet argent pour couvrir les besoins les plus urgents de leur ménage, et n’ont alors plus rien pour répondre aux besoins de leur entreprise.

Pour d’autres, les activités commerciales sont complètement paralysées. Les femmes concernées s’efforcent de faire face à la charge financière cumulée que représente le maintien à flot de leur entreprise, la rémunération de leur personnel, le remboursement de leur crédit ou le remplacement de pièces défectueuses de leur équipement sans qu’elles ne puissent en tirer de revenus.

 Au cours des premiers mois de 2020, nous avons enregistré des taux élevés de remboursement des crédits, d’environ 88 %, chez les femmes entrepreneures. Cependant, la situation s’est rapidement détériorée au mois d’avril, lorsque les mesures de lutte contre la pandémie ont été mises en place. Les créanciers ont commencé à constater une forte augmentation des impayés, avec un doublement au cours des mois d’été. De nombreux fournisseurs de technologies qui ont fourni du matériel à crédit sont maintenant confrontés à une crise de trésorerie. Cette crise a également augmenté le risque d’octroi de crédit des institutions de microfinance, dit Jean César Ndione.

Ce sont des femmes qui travaillent dur, elles étaient sur la bonne voie pour apporter une différence dans leur vie avant la pandémie. En combinant nos efforts, nous pouvons les aider à surmonter cette période difficile et à devenir plus résilientes à l’avenir, a-t-il déclaré.

L’aide financière permet à Fatou de se remettre sur pied

Fatou Thioune est propriétaire d’un périmètre maraîcher à Mboro, dans l’ouest du Sénégal. Grâce à un partenariat mis en place par Energy 4 Impact il y a un an entre une institution de micro-finance et un fournisseur de systèmes d’irrigation solaire, Fatou a pu acheter à crédit une pompe d’irrigation solaire pour améliorer la productivité de son entreprise.

Fatou vend généralement les légumes qu’elle cultive au marché local mais, avec la fermeture des marchés pendant l’état d’urgence, elle n’avait plus accès à ses clients et a dû se résoudre à vendre ses légumes depuis son domicile pour éviter qu’ils ne pourrissent ; ce, à un prix tellement bas qu’elle a fait une perte. Fatou était très stressée, car elle devait encore 900 euros à ses créanciers, mais elle n’avait pas assez d’économies pour rembourser ses dettes et réinvestir dans son entreprise pour relancer son activité.

Aujourd’hui, elle se remet sur pied. Grâce au fonds de solidarité, elle recevra une contribution financière pour couvrir à la fois le coût du remboursement du crédit, et libérer un peu d’argent pour construire un bassin de stockage d’eau afin d’optimiser la gestion de l’eau pour l’irrigation et ainsi faire avancer son entreprise pour l’avenir.

Un capital neuf pour le redémarrage de la coopérative

Le GIE BAMTARE est une coopérative de 200 femmes qui transforment et vendent des fruits à pulpe et des jus. Située dans le village isolé de Diarre Mbolo à Tambacounda, dans l’est du Sénégal, l’entreprise s’appuie fortement sur les congélateurs solaires. Lorsque certains des membres de la coopérative sont tombés malades, ils ont été soupçonnés d’avoir contracté un coronavirus. Afin de contenir la propagation du virus, le chef du village a interdit toute production et vente de jus. Le chiffre d’affaires de la coopérative a alors chuté.

Le fonds de solidarité fournira un fonds de roulement pour l’achat de matières premières, d’emballages et de glacières afin de les aider à reprendre leurs activités. Elles achèteront également une bicyclette pour prospecter dans les villages environnants et se faire de nouveaux clients.

Sept des femmes entrepreneurs de la coopérative, qui utilisent des congélateurs solaires pour conserver les aliments et les jus de fruits frais, recevront un financement pour remplacer leur matériel défectueux. L’entretien de l’équipement est un problème qui les rend vulnérables lorsque : et le fonds de roulement et la trésorerie se tarissent ; elles sont alors incapables de remplacer les pièces défectueuses lorsqu’elles tombent en panne. Grâce à ce fonds, elles recevront six nouveaux systèmes de pompage et un nouveau congélateur. Douze autres femmes recevront douze nouvelles batteries. Elles sont maintenant bien partis pour relancer la production.

La transformation numérique

Les technologies de l’information et de la communication jouant un rôle important dans le monde entier pour assurer la continuité des activités et de la vie quotidienne pendant la pandémie et les blocages qui en résultent, l’accès à la technologie a été vital. Mais la fracture numérique entre les sexes est plus apparente que jamais. Il existe un écart persistant entre les hommes et les femmes en matière de téléphonie mobile dans les pays à faibles et moyens revenus, où les femmes ont 10 % moins de chances que les hommes de posséder un téléphone portable et 23 % moins de chances d’utiliser l’internet mobile.

La pandémie a mis en évidence le fait que peu de femmes cheffes d’entreprise possédaient un smartphone ou une tablette. Une transformation numérique de leur entreprise est donc essentielle à leur réouverture.

C’est pourquoi l’un des objectifs du Fonds de solidarité sera d’accroître l’utilisation des technologies numériques par les femmes. Les bénéficiaires recevront des tablettes et seront formées à la collecte et à l’utilisation de données économiques liées à leurs activités commerciales afin qu’elles puissent suivre les performances de leur entreprise.

L’équipe Energy 4 Impact travaillera avec les entrepreneurs pour renforcer leurs compétences numériques dans l’utilisation de leurs smartphones et tablettes pour :  – partager des informations relatives aux coronavirus, – transférer de l’argent par le biais de plateformes de paiement mobiles, – développer leur clientèle, – commercialiser des produits en ligne à l’aide des réseaux sociaux, – et partager des enregistrements vidéo et audio.

 Il est plus important que jamais de combler le fossé numérique pour aider les femmes entrepreneures à faire face aux pressions économiques de la pandémie. Etant donné que la majorité des entreprises que nous soutenons n’ont pas accès aux smartphones et aux bornes de recharge, c’est un domaine clé sur lequel nous pouvons les aider pour la reprise de leurs activités, dit Jean-César.

Des prestations étendues

Energy 4 Impact travaille en étroite collaboration avec toutes les entrepreneures bénéficiaires du fonds, et leur fournit un soutien sur mesure pour faciliter la relance de leurs entreprises, renforcer leur résilience aux risques multiples et les aider à reconstruire leurs activités.

Nous prévoyons une augmentation de 50 % des revenus des 69 groupes cibles bénéficiant du fonds de relance Covid-19 au cours des six prochains mois. L’impact s’étendra au-delà de leurs entreprises, en profitant aux 4 752 personnes issues des familles de ces 594 femmes entrepreneures, dit Jean-César.

Avec leurs entreprises durables, elles contribuent à un monde plus propre. Elles sont à l’avant-garde de la lutte contre la pauvreté énergétique, les inégalités et le changement climatique, a-t-il déclaré